Fais pas ton Jean Gabin!
"World Trade Center"; d'Oliver Stone.
11 septembre 2001.
On va pas vous faire un dessin: après que de gros méchants navions aient déclenché le Grand Incendie, les Tours font boum sur Nicolas Cage et Michael Peña leurs tiesses...
Les v'la coincés sous 6 tonnes de gravats. Il va falloir qu'ils s'organisent pour survivre...
Maria Bello (qui faisait joujou avec Aragorn dans le dernier Cronenberg) et Maggie Gyllenhaal (la soeur de l'autre) a.k.a. leurs femmes restées à l'extérieur, ont des raisons de se faire du mouron.
Non?
Ouais...
Alors avant tout, il faut quand même bien garder à l'esprit que le Oliver Stone qui a réalisé ce brol est le même que celui à qui l'on doit des choses comme "Platoon", "Né un 4 Juillet", "J.F.K." ou "Tueurs Nés".
Mieux: il faut aussi se dire que c'est lui qui dans sa folle jeunesse a scénarisé "Scarface" et "Midnight Express"!
Parce que quand même...
Il fallait bien qu'il se dise qu'il avait quelque chose à se reprocher pour signer un film aussi larmoyant et politiquement correct que ce gros soufflé à mi-chemin entre "La Tour Infernale" et "Desperate Housewives".
Lui qui jusqu'ici (enfin, jusqu'à "Nixon" en tout cas) s'était montré plutôt virulent dans sa critique des limites du système américain - à sa manière tonitruante et ampoulée, bien entendu - fait plus que mettre de l'eau dans son vin, il le noie.
Comme s'il devait des excuses à son pays pour l'avoir jadis si mal servi.
On s'attendait à un film sur les attentats, un gros machin-catastrophe lorgnant sur le film de guerre. On se retrouve avec un mélodrame presque intimiste qui en remet trois couches dans le pathos.
Les familles pleurnichent en coulisse et on se focalise tellement sur elles qu'on en finit par croire qu'il n'y a eu que deux victimes. Et encore...
Malgré le gigantisme du sujet, l'ampleur du traitement et l'énormité du décor tout est petit, réduit, mesquin.
Ca chipote, ça toussotte, ça ne décolle jamais...
Entre ce personnage de Rambo messianique venant sauver son pays "en guerre" et l'intervention de Jésus lui-même, bouteille de flotte à la main on n'en finit plus de se gratter la tête, tellement on est perplexe.
Pourtant ça avait plutôt pas mal démarré, avec les vingt premières minutes très réalistes, la caméra collant aux protagonistes jusqu'à l'intérieur des Tours.
Tellemment tripal qu'on en est presque surprit quand le drame surgit.
Et ça avait même fort bien continué, une fois les flics ensevelis et coincés.
Les meilleurs moments du film sont même à chercher là, dans la claustrophobie et les explosions souterraines. Dans le désir de survivre à tout pris de ces deux types qui s'encouragent l'un l'autre à ne jamais perdre pied.
Mais non, chaque fois qu'on se dit qu'on y est, qu'on arrive à l'os, à la substantifique moëlle, Monsieur Stone surgit et vous retire par le paletot jusque dans sa banlieue proprette ou des ménagères de moins de cinquante ans tombent en sanglots dans les bras de leurs parents, où des ados perturbés chouinent sur leur fête d'anniversaire évidemment gâchée, où des petites filles aux yeux de Bambi se demandent si elles reverront un jour leur gentil papa.
Les yeux se mouillent, la morve coule...
Ca dégouline de mièvrerie rose bonbon jusqu'a contaminer complètement la partie "réussie" et à la rendre inutile et complètement vide de sens.
La dignité du début d'effondre tout-à-trac et on se retrouve face à une sorte d'outil de propagande complètement schizophrène puisque s'y retrouvent quand même, éparses, les préocupations habituelle de son auteur: le rêve américain, le soucis de la démocratie, la guerre et sa représentation...
Une grosse boursouflure idiote, même pas désagréable à voir, juste creuse. Complètement creuse.
"World Trade Center"?
Sans doute le film qu'il ne fallait pas faire sur le 11 septembre...
Si tant est qu'il faille en faire un.
(PS: je tiens à préciser que je ne vais pas voir que des blockbusters et des séries B. J'ai aussi vu récemment "Quand j'étais chanteur" (très bon) et "Le Vent se Lève" (sidérant!) mais je ne me sens tout simplement pas les épaules assez larges que pour parler de films pareils. Wala. On sait jamais)
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