Wednesday, December 20, 2006


Fais pas ton Jean Gabin!

"Zwartboek"; de Paul Verhoeven.

La Haye, sous l'Occupation allemande. Après avoir vu sa famille se faire massacrer par les nazis lors d'une tentative de passage en Zone Libre, la jeune Rachel Stein rejoint la Résistance sous le nom d'Ellis de Vries. Sa première mission consistera à séduire le capitaine Mûntze, chef de la Gestapo locale...

Six ans après le très moyen "Hollow Man" et vingt-trois ans après "Le Quatrième Homme", Paul Verhoeven est donc de retour aux affaires et dans son pays natal.

Et le moins que l'on puisse dire c'est que ça lui réussit!

Avant tout récit d'aventures ultra classique bourré de rebondissements et de retournements de situation imprévisibles, "Zwartboek" est aussi un film de guerre quasi fétichiste (le soin apporté à la reconstitution est hallucinant) qui enfile les morceaux de bravoure comme autant de perles sur un collier.
Servi par une réalisation d'une fluidité exemplaire et littéralement porté par la sublimissime* Carice van Houten, le film est remarquable tant par son audace que par l'intelligence de son propos.

Certes, Verhoeven s'est un peu calmé avec l'âge mais son petit dernier, traversé par des éclairs de violence, d'humour cru et de sexualité débridée porte malgré tout sa marque de fabrique, jusque dans ses excès et dans ses maladresses.

Grand film romanesque et populaire - on pourrait presque écrire "à l'ancienne" - "Zwartboek" traduit magnifiquement la passion de son auteur pour son art et scotche le spectateur à son fauteuil tout en réussissant le tour de force de le faire réfléchir.

Car, en jouant à merveille sur les faux semblants, il livre aussi - et s'est sans doute ce qui fait toute sa force - une réflexion passionnante sur les notions même de Bien et de Mal et sur la complexité des rapports humains, particulièrement en temps de conflit.
De ce point de vue, la séquence située au moment de la Libération ou, dans un même mouvement de caméra Verhoeven parvient à renvoyer dos-à-dos victimes et bourreaux, Résistants et collabos est une merveille de technique et de pertinence.

Contournant les clichés du film de guerre le Hollandais repousse une fois encore, mine de rien, les limites de l'audace et du politiquement correct.

Bien sûr, la fin est un peu longuette et l'on peut déplorer la lourdeur appuyée de la dernière image mais l'un dans l'autre et quelque soit la façon dont on l'appréhende (film à thèse déguisé ou simple divertissement de facture "classique") cette fresque romantique et quasi-hitchcockienne passionne et interpelle.

Alors "Zwartboek" du cinéma de papa?
Peut-être, mais alors du genre vigoureux et dont on redemande.


(*et je pèse mes mots).

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